► Allard, J. - Feuillâtre, E. En grec et en français, Cours de langue grecque J. Allard et E. Feuillâtre, Librairie Hachette, 1947, 13 x 20, 144 pages, broché. Neuf. Réimpression de l'édition Hachette de 1947 en petites séries.
Il est curieux que l'on ne trouve, au sein de l'œuvre immense laissée par Ernest Renan, aucun ouvrage spécifiquement consacré à la Grèce. Car, ainsi qu'Henri Peyre le démontre à merveille, la référence passionnée à l'art, à la philosophie, à la mythologie grec, parcourt (comme en fil rouge) l'ensemble des travaux du savant, depuis ses premiers textes. Plus précisément, la Grèce, chez Renan, s'exprime simultanément par fragments concrets et par ligne mélodique continue,"flottante", d'un dithyrambe sans variations.
Si Renan a pu contribuer à la connaissance savante du monde grec (par des études linguistiques ou philologiques très précises), il a développé par ailleurs une vision plus vaste, plus libre et sans doute plus poétique d'une civilisation idéalisée (le fameux - ou fumeux? - "miracle grec"), proclamant l'universalité et l'unicité de sa pensée : "Tout ce que l'Orient sémitique, tout ce que le Moyen Âge ont eu de philosophie proprement dite, ils le doivent à la Grèce"...
Dans son rapport avec celle-ci, Renan fleurte avec le romantisme. Conscient de ses zones sombres d'irrationalité, de son "tragique" ou de son hubris, il ne cessera pourtant d'admirer la "fraîcheur exquise" de l'esprit grec, plein de fantaisie et d'originalité inventive. Dans son Histoire du Peuple d'Israël, la grande œuvre crépusculaire, Renan écrit : "Notre science, notre art, notre littérature, notre philosophie, notre morale, notre politique, notre stratégie, notre diplomatie, notre droit maritime et international, sont grecs d'origine (...) Le progrès consistera éternellement à développer ce que la Grèce a conçu, à remplir les desseins qu'elle a, si l'on peut s'exprimer ainsi, excellemment échantillonnés."