► Allard, J. - Feuillâtre, E. En grec et en français, Cours de langue grecque J. Allard et E. Feuillâtre, Librairie Hachette, 1947, 13 x 20, 144 pages, broché. Neuf. Réimpression de l'édition Hachette de 1947 en petites séries.
Ce livre est le premier recueil, avec introduction, traductions et commentaires, de tous les témoignages sur Héraclite conservés en latin.
Les spécialistes des Présocratiques se sont peu intéressés aux textes latins qui nous sont parvenus, les considérant comme des traductions maladroites ou des comptes rendus inutiles. Cette approche se révèle trop réductrice, car la tradition latine, riche de citations dans les deux langues, peut éclairer les sources grecques. C'est ainsi que Cicéron est le seul qui révèle la gêne des Néoacadémiciens grecs devant un penseur créateur de thèmes virtuellement sceptiques et qui apparaissait néanmoins comme l'ancêtre du stoïcisme. Le fait même qu'Héraclite ait pu intéresser des Romains constitue un fait considérable pour l’étude de l’acculturation de la philosophie à un monde autre que celui qui l’avait vue naître. Il était considéré comme le penseur du flux universel, tandis qu’à Rome prévalait la notion de grauitas, cette pesanteur fondatrice de toutes les valeurs. Les Romains auraient donc dû se sentir étrangers à un philosophe qui pouvait leur apparaître comme l’incarnation de la leuitas des Grecs, de leur difficulté à affronter la durée. Ce que montre ce livre, au contraire, c’est leur fascination à son égard et une perception originale de ses grands thèmes. Ils se sont intéressés à l’obscurité de son langage, à ses larmes légendaires, à sa pensée du feu ; en revanche, à l’exception de Sénèque, ils se sont sentis peu concernés par le thème du flux et par sa relation au stoïcisme. Quels sont les cheminements qui ont permis la diffusion de son œuvre en latin ? Qu’est devenue son image à l’avènement du christianisme ? Telles sont quelques unes des questions auxquelles ce livre veut répondre.
Carlos Lévy est professeur de littérature et philosophie romaines à l’Université Paris-Sorbonne, où il a longtemps dirigé l’équipe de recherche « Rome et ses renaissances », correspondant de l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres. Aux Belles Lettres on lui doit Devenir Dieux, Paris, 2010, dans la collection « Signets ».
Lucia Saudelli, docteur en histoire de la philosophie antique à l’École Pratique des Hautes Études de Paris et à l’Università di Urbino (Italie), est actuellement post-doctorante et chargée de cours à l’Université Paris I, Panthéon-Sorbonne.