► Allard, J. - Feuillâtre, E. En grec et en français, Cours de langue grecque J. Allard et E. Feuillâtre, Librairie Hachette, 1947, 13 x 20, 144 pages, broché. Neuf. Réimpression de l'édition Hachette de 1947 en petites séries.
L'expression peut sembler paradoxale. Comment voir un concept qui, par nature, échappe au regard ? Comment, surtout, le donner à voir ? Cette question marque profondément la philosophie romaine de la fin de la République et du Haut-Empire : soucieux de transmettre leur doctrine, les penseurs romains choisissent bien souvent de doubler leur démonstration théorique par une mise en images de la philosophie. En plaçant la philosophie sous les yeux de leur destinataire par le biais de procédés rhétoriques variés, ils s’efforcent de la rendre accessible, familière et de lui donner ainsi droit de cité à Rome. Cette étude s’emploie dès lors à montrer d’une part comment la philosophie était représentée à Rome, d’autre part pourquoi elle l’était. La résolution de cette double question repose sur l’exploration de la notion de représentation dans la rhétorique antique, elle-même liée à celle du concept d’évidence (enargeia en grec, euidentia en latin), puis sur l’analyse de la manière dont les philosophes percevaient le recours à l’image. La question des représentations de la philosophie rejoint ainsi la problématique plus large des rapports entre la rhétorique et la philosophie. En effet, la méfiance des philosophes à l’égard de la rhétorique, héritée de Platon, est toujours perceptible dans la philosophie hellénistique et romaine, et le recours à la rhétorique de l’évidence pose certains problèmes éthiques et philosophiques qui forcent les penseurs à préciser les conditions d’un usage acceptable de la représentation rhétorique. Le recours à l’image est-il compatible avec les exigences épistémologiques et éthiques des philosophes ? La lecture des textes romains apporte une réponse à cette question en révélant que l’usage des représentations répond à des exigences pédagogiques, parénétiques et heuristiques, mais aussi à des enjeux plus spécifiquement doctrinaux et polémiques. Cette diversité fonctionnelle explique pourquoi l’usage des représentations de la philosophie s’est développé dans la littérature philosophique romaine. Elle met plus largement en lumière la symbiose croissante, à Rome, entre la rhétorique et la philosophie et laisse ainsi entrevoir la spécificité et l’originalité de la pensée romaine par rapport à la pensée grecque.