Antiquité tardive et haut Moyen Âge.
The Paper Museum of Cassiano dal Pozzo. A Catalogue raisonné. Drawings and Prints in the Royal at Windsor Castle, the British Museum, the Institut de France and other Collections, Series A. Antiquities and Architecture, Part Two. Early Christian and Medieval Antiquities, Volume 1. Mosaics and Wallpaintings in Roman Churches, by John Osborne and Amanda Claridge, with contributions by Cecilia Bartoli and Eileen Kinghan, Harvey Miller Publishers, Londres, 1996.
Cassiano dal Pozzo (1588-1657) est l'un des « contemporains majeurs » de l'Italie du Seicento. Issu d'une famille en vue de la cour des ducs de Savoie, familier des cours de Toscane et des Médicis, puis de celles d'Urbain VIII, d'Innocent X et d'Alexandre VII, ami de Galilée et commanditaire de Poussin, il s'était installé en 1612 à Rome, et devenait, en 1622, membre de l'Accademia dei Lincei. Mais c'est plus précisément auprès du cardinal neveu Francesco Barberini qu'il a l'occasion de se familiariser avec les grandes collections artistiques et scientifiques de son temps, et de fréquenter quelques unes de grandes figures d'érudits du XVIIe siècle, lors de ses voyages en Espagne et en France (tel Nicolas-Claude Fabri de Pereisc, par exemple). Installé dans le palazzo de la Via dei Chiavari, il s'attache à rassembler des collections de peintures, de dessins d'après l'Antique, de planches scientifiques, comme celles de Federigo Cesi qui avait fondé en 1603 l'Académie pontificale dont le lynx est l'emblème. Après sa mort, Carlo Antonio continuera de compléter les collections de son frère aîné; elles seront dispersées par la suite, et se trouvent aujourd'hui pour la plupart dans les collections britanniques et françaises.
Dans le cadre de l'élaboration d'un Catalogue raisonné du Museo Cartaceo, tant des 4200 documents concernant l'architecture et les Antiques (série A) que des 2700 documents relevant de l'histoire naturelle (série B), ce volume présente 162 dessins et aquarelles provenant des albums des Mosaici Antichi qui sont conservés à la Royal Library du château de Windsor, intéressant le décor mosaïque des églises paléochrétiennes de Rome. Après une introduction générale de Francis Haskell et Henrietta Mc Burney sur Cassiano dal Pozzo et la constitution de ses collections, on y trouvera une analyse d'ensemble, sous la plume de Amanda Claridge, de la série A (p. 33-40), puis un chapitre sur le regard porté par la Rome du XVIe et du XVIIe siècle, sur son passé chrétien antique et médiéval — la naissance de l'archéologie chrétienne de Rome, pour laquelle la publication de la Roma Sotteranea de Bosio en 1634-1635 marque une étape fondamentale — dû à John Osborne (p. 41-52) et enfin une présentation, signée de John Osborne, Amanda Claridge et Eileen Kinghan, des albums de mosaïques antiques et du catalogue raisonné publié ici (p. 53-68). En annexe, des tables de concordance — notamment des numéros du catalogue raisonné et des numéros d'inventaire de la Royal Library avec l'identification des monuments — et une bibliographie classée alphabétiquement, qui retient principalement des études sur les « antiquaires » du XVIe et du XVIIe siècles, et les ouvrages ou articles de référence concernant les monuments dont sont reproduits les décors de mosaïque.
Le catalogue suit un ordre topographique, monument par monument. Une courte introduction situe géographiquement chaque monument et fournit les principales dates de son histoire. Puis sont analysées la ou les planches relatives à ce monument; lorsque les mosaïques sont conservées, les notices se limitent à une identification des scènes ; en revanche, lorsqu'elles sont perdues, les notices présentent les différentes hypothèses suscitées par les scènes reproduites, tant quant à leur association dans l'église que quant à leur signification. Ce sont évidemment ces dernières qui intéresseront au premier chef les historiens de l'art paléochrétien. Ainsi pour Sainte-Marie- Majeure, par exemple, un dessin anonyme du XVIIe siècle (n° 82 du catalogue) reproduit l'un des panneaux de mosaïque (le premier du mur droit de la nef à compter de la façade) qui ont été remplacés par des peintures lors des restaurations du Cardinal Pinelli à la fin du XVIe siècle — sans doute la présentation au Temple. Mais tout l'intérêt de ce catalogue ne s'épuise pas là. Il témoigne aussi des curiosités scientifiques du XVIIe siècle, qui s'exprime sous la forme particulière de ces collections où l'histoire et l'archéologie se mêlent aux sciences naturelles pour parvenir à une forme d'inventaire du monde. Enfin, ces dessins ou aquarelles permettent également — notamment lorsqu'on peut les comparer aux décors originaux — d'élaborer une manière de psychologie du regard indispensable à la connaissance de l'esthétique du XVIIe siècle. On y trouve autant d'exemples de fidélité « objective » que d'interprétations libres, au moins quant au style. Ainsi les reproductions de l'arc triomphal de Sainte-Françoise- Romaine (n° 84 et 85), par exemple, sont d'une précision qui les rapprochent du relevé, tandis que pour les peintures du XIe siècle de Saint-Pudentienne (n° 146), le graphisme hiératique du style byzantin disparaît totalement dans les rondeurs alanguies et un peu molles du dessin.
La qualité des reproductions (netteté et couleurs), la mise en page élégante et aérée, contribuent à faire de cet ouvrage, indispensable à la recherche sur les décors des églises paléochrétiennes et médiévales du Siège de Pierre, un livre d'art poétique sur les renaissances et la mémoire de la Rome du passé.
In Monfrin Françoise. The Paper Museum of Cassiano dal Pozzo. A Catalogue raisonné. Drawings and Prints in the Royal at Windsor Castle, the British Muséum, the Institut de France and other Collections, Séries A. Antiquities and Architecture, Part Two. Early Christian and Medieval Antiquities, Volume 1. Mosaics and Wallpaintings in Roman Churches, by John Osborne and Amanda Claridge, with contributions by Cecilia Bartoli and Eileen Kingham, Harvey Miller publishers, Londres, 1996., Bulletin Monumental, 1997, vol. 155, n° 1, pp. 322-323.
