Choix de poèmes traduits du sanscrit tirés du Vidyâkara. Introduction, traduction et notes par Dominique Wohlschlag.
• L'Inde est terre de contrastes. Elle hante notre imaginaire de mendiants hagards grouillant sur le parvis des temples comme de bayadères langoureuses dansant sur les bords d'un étang. Imperturbable, l'ascète nu marche au milieu de senteurs et de mélodies flottantes d'une enivrante sensualité. Un moine bouddhiste du 11ème siècle aime les fleurs. De rhétorique s'entend. Dans un monastère perdu du Bengale il compose pour la postérité durant ses loisirs un bouquet de 1738 vers « bien tournés », puisés çà et là dans l'immense réservoir du kâvya, la poésie lyrique sanscrite. Il y est question de nostalgie amoureuse, de dieux, de saisons, d'exploits chevaleresques, mais aussi de misère, d'adultères, de fantômes. La présente sélection retient les pièces où les poètes se sont ingéniés à décrire l'instant trouble où la jeune fille devient femme. Nulle part ailleurs on ne touche plus à l'indicible, c'est-à-dire à la fugace essence de la poésie. En se découvrant à elle-même la Beauté devient Pouvoir mais elle ne le soupçonne pas. Eros est bien né. Il est à l'affût mais la belle ignore encore jusqu'à son nom.